J’ai peur de fermer l’œil et de le rouvrir De peur qu’à mon réveil je ne sois plus moi-même. J’ai peur que mon sommeil soit l’appel au dévil, Qu’il annonce en mon corps le festin des charognes.
Quel empire a le mort sur sa vie épuisée Alors qu’il voit son corps mais n’en a pas l’usage ? Que peut l’encre impalpable sur l’encre profonde Alors qu’elle s’envole et ne tient au support ?
Mais, que disent ces gens qui pensent me connaître ? Je voudrais interrompre le torrent létal Et faire qu’enfin cesse ce satané sonnet ! Ah, ils achèvent plus encore ma vie !
Ils entrent en mon intime, exilent mes secrets, Nul recoin de mon antre n’échappe à leurs mains. Ils arrachent mes biens et ils les portent au jour Sans voir que même mort j’aime encore en secret.
J’ai peur de ce sommeil où les écrans s’animent Et présentent en première mes hauts et mes revers. Je voudrais même encore disposer de moi-même, Mais ma poigne d’antan ne tient plus que poussière…